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Chapitre 14 : Essence d'innocence

 
Chapitre 14 : Essence d'innocence 
 
 
 
Chapitre 14 : Essence d'innocence 
Miranda Otto as Alwena Azer
 
 
 
 
Été 1977.
 
 
Lors de cette soirée d'avril, Regulus et moi parlâmes longtemps. Pas tant de ma stérilité et de tout ce qu'elle entraînait, mais je sentais que nous ne nous éloignions jamais trop de ce sujet non plus. Nous nous contentions d'échanger des paroles grandiloquentes, des consensus vides de sens qui réussissaient tout de même à nous rassurer. Nous refaisions le monde à notre façon, comme se plaisent souvent à dire les adultes en considérant avec bienveillance les discussions enthousiastes de la jeunesse. Ça ne rimait à pas grand-chose. Mais, si ce monde qu'on inventait ne pouvait exister qu'entre nous et à l'abri dans la clairière des Sombrals, il ne nous paraissait pas moins beau pour autant.
 
Quoique je ne sais pas si beau est le mot adéquat. Disons qu'il était plus facile. Après tout, qu'est-ce qui pouvait être plus facile à vivre qu'une existence où les intentions valaient autant que les actes, si ce n'est plus ? Où nos lâchetés respectives – à l'égard de nous-mêmes ou bien à celui des autres – n'étaient plus jugées mais acceptées ? Ce soir-là, et bien d'autres qui suivirent, peu nous importait que j'aie passé huit ans à regarder ma famille s'effriter sans faire le moindre geste. Encore moins que Regulus n'ait été qu'un couard en laissant fuir son frère sans essayer de le retenir et en acceptant les idées de ses parents. Pourquoi nous en tenir rigueur, puisque nous n'avions jamais voulu que les choses tournent ainsi ?
 
Encore aujourd'hui, je ne sais si ces moments passées à discuter au voisinage des Sombrals nous avaient été bénéfiques ou non. Parce que, bien que par la suite ils nous aient régulièrement amenés à nous voiler la face en allant jusqu'à nier l'existence même de la guerre et des deux camps auxquels nous appartenions, sur le coup ils nous réconfortèrent et l'un et l'autre.
 
En effet, pour ma part, pouvoir parler de ma subite stérilité avec Regulus agit comme un effet libérateur. C'est suite à nos longues discussions que je compris que j'avais été stupide de garder tout cela pour moi. J'avais craint d'être maladroite en mettant des mots sur ce que je ressentais mais, en réalité, si cette crainte avait eu quelque réel fondement, ce n'était que parce que, avant cette soirée, j'étais incapable de comprendre ce que je ressentais. Larmes, phrases avortées et sanglots exprimaient ma peine bien mieux que ne l'auraient fait des mots consciemment réfléchis, et nimbaient le foutoir qui régnait dans ma tête et dans mon c½ur avec une justesse peu commune. Et c'est au contact de Regulus que ma parole appris petit à petit à se libérer.
 
Marly fut la première personne à qui j'en parlai de mon plein gré. Puis Angel et Becca suivirent, de même que Charlie et Theo. Le temps qui passait aidant, j'eus également enfin le courage de répondre aux lettres de mes parents mais, à mes frères, aux Maraudeurs, à Lily ou à Joyce, je ne pus à cette époque rien confier. Ce que les uns représentaient pour moi était trop flou pour que je ne comprenne réellement quelles relations nous entretenions, tandis que je ne voulais ni de la pitié des autres ni de la culpabilité de la dernière.
 
Ainsi commença une période plutôt trouble pour moi, dont je ne garde de précis que les dates. De début juin à mi-juillet environ, je fus prisonnière des mêmes sentiments, trop confus pour que je puisse ici vous les décrire. « Tu avais l'air de faire semblant », m'a avoué Theo il y a peu. « Tu faisais comme si on arrivait à te réconforter alors qu'au fond personne n'était dupe. Mais c'était ta manière à toi de guérir et d'aller de l'avant. » Peut-être a-t-il raison en ce qui concernait ma manière d'agir avec lui, le reste de notre bande et Marly. Cependant, quand je repense aux deux difficiles semaines que j'eus à affronter à mon retour de Poudlard, je ne peux consciemment dire qu'il s'agissait de ma manière d'aller mieux.
 
Effectivement, pendant ce laps de temps, je fus tout à fait intraitable avec mes parents, et surtout avec ma mère. Je ne supportais pas de la voir veiller sur moi comme si j'étais une plante sans tuteur prête à s'effondrer au moindre coup de vent. Le fait qu'elle ait pris des jours de congés pour passer du temps avec moi me rendait folle, tout autant que ses entrées intempestives dans ma chambre afin de voir comment j'allais ou bien ceux ses piètres tentatives d'engager la conversation à propos du sujet qui, visiblement, l'obnubilait.
 
Il y eut deux fois en particulier où je m'en pris injustement à elle et me mis à lui crier dessus sans même être capable de me contrôler. La première, ce fut quand, sans faire exprès, elle me lança « Comment ça va, mon bébé ? » un matin où je descendais prendre mon petit-déjeuner. L'allusion, même involontaire, au fait que j'étais sa fille me rappela avec la force d'une gifle que, moi, des enfants, je n'étais plus capable d'en avoir. Quant à la seconde, ce fut quand elle se mit à s'intéresser à ma maigreur comme jamais elle ne l'avait fait auparavant. J'avais toujours été aussi fine qu'une allumette, et qu'elle en fasse des montagnes et s'inquiète de mon régime alimentaire alors que je n'avais pas perdu le moindre gramme m'irrita, si bien que je finis par balancer sur la table la dernière part de tarte aux prunes qu'elle tentait de me refiler de force avant de m'enfermer dans ma chambre.
 
Après cet incident, je suis presque certaine que mon père mit Jake et Arthur au courant de ce que je traversais. Les regards, même discrets, qu'ils me lancèrent par la suite me le montrèrent bien. Mais je n'en voulus pas à mon père pour cette indiscrétion. Bien au contraire : désormais consciente des remous que j'avais causé à la maison et de la mauvaise ambiance dont, pour une fois, la charge me revenait totalement, cela m'encouragea à aller m'excuser et enterrer la hache de guerre avec ma mère.
 
Je profitai d'une journée où elle travaillait depuis la maison pour aller la rejoindre dans son cabanon après m'être assurée que mes frères et ma s½ur ne traînaient pas dans le jardin. En m'entendant entrer, elle posa sur moi un regard dont je me souviens encore parfaitement, à la fois empreint de peine et de douceur.
 
 
— Je l'avais oubliée, tu sais, lâchai-je en guise d'introduction, faisant référence à la rose de nuit.
— Je me doute.
 
 
Un silence, lourd comme du plomb, suivit ses paroles.
 
 
— Alors pourquoi tu t'en veux ? finis-je par demander. Tu as fait ce qu'il fallait : tu m'as mise en garde, et on ne peut que blâmer ma mémoire et le temps pour ce qui est arrivé.
 
 
Et mon insouciance, ajoutai-je pour moi-même, me gardant bien de le formuler à haute voix.
 
 
— Tu ne comprends pas, Alicia, murmura faiblement ma mère.
— Si ! protestai-je vivement. Tu t'en veux parce que tu as l'impression que c'est de ta faute si j'ai été touchée par le venin de la rose de nuit. Mais qu'est-ce que tu pouvais faire de plus que ce que tu as déjà fait ?
 
 
Ma réplique fit soupirer ma mère et elle se détourna pour faire face à son établi, comme si elle souhaitait ne plus me voir. À l'époque, sa réaction m'irrita plus qu'elle ne me surprit et je manquai de quitter le cabanon en abandonnant là mes résolutions toutes fraîches d'arranger les choses. Cependant, maintenant que je revis la scène dans ma tête, j'ai la quasi-certitude que l'affaissement de ses épaules n'était dû qu'au poids incommensurable de sa propre impuissance en ce qui concernait mon destin et mes malheurs.
 
 
— Tu ne comprends pas, répéta ma mère alors que je m'apprêtai à rouvrir la porte. Bien sûr que je m'en veux pour ça, mais pas seulement.
 
 
Lorsqu'elle releva de nouveau les yeux vers moi, ils étaient embués de larmes.
 
 
— Quand on m'a envoyé cette plante pour que je l'analyse, j'étais ravie. Autant de la confiance qu'on m'accordait que du sujet d'étude. Elle me fascinait, cette rose. Je trouvais son aspect, ses propriétés et son histoire aussi horribles que fascinants, et...
— C'est quoi son histoire ? ne pus-je m'empêcher de la couper en m'adjugeant le petit tabouret qui traînait près de la porte.
 
 
La faiblesse momentanée de ma mère s'effaça d'un souffle et ses traits se durcirent.
 
 
— Ça ne te fera pas du bien de le savoir, affirma-t-elle.
 
 
Je m'énervai :
 
 
— Pourquoi vous dites tous ça ? Il n'y a que moi que ça regarde, merde !
— Alicia, ton langage !
— Mais c'est vrai ! m'indignai-je. Vous êtes tous là, à vouloir me protéger, mais est-ce que vous vous êtes déjà demandé si votre inquiétude n'était pas plus toxique que l'histoire d'une plante qui ne peut plus rien me faire ?!
 
 
Ma mère se retrouva à côté de moi d'un bond et, pendant une seconde, je crus qu'elle allait me gifler, comme elle l'avait déjà fait à une unique occasion, lorsque Jake, Marly et moi avions perdu Arthur dans la forêt qui jouxtait La Scierie, enfants. Mais elle dut surprendre ses propres intentions aussi bien que moi puisque la crispation de son visage se défit d'un coup pour laisser place à un abattement plus visible que jamais. Elle laissa une larme couler sur sa joue puis, prise de je-ne-sais-quelle impulsion, elle s'empara du tabouret jumeau du mien et le plaça face à moi avant de s'y asseoir.
 
 
— Tu connais le poète moldu Pierre de Ronsard ?
 
 
Je fis non de la tête.
 
 
— Il possédait un château dans le parc duquel il faisait pousser des dizaines de variétés de roses. On raconte qu'un jour, une sorcière s'enticha de lui et, voyant le nombre auquel s'étendaient ses maîtresses, elle ne put contenir sa jalousie et se mit à comploter afin de trouver le meilleur moyen de leur nuire et de se venger de l'indifférence du poète à son égard. Alors elle se mit au travail, jour et nuit, jusqu'à ce que, une nuit, elle mette au point une rose dont la senteur avait le pouvoir d'endommager l'appareil reproducteur d'une femme de sorte à ce qu'elle soit par la suite incapable de tomber enceinte. Elle en fit don à l'homme qu'elle aimait et celui-ci, subjugué par la beauté de la fleur, la planta à une place de choix dans son jardin et en fit un outil de ses numéros de séduction, participant ainsi au malheur de toutes ses maîtresses. Des années plus tard, un descendant de la créatrice de la rose de nuit retrouva les notes que celle-ci avait pris pendant ses mois de recherche et en rapporta l'existence à la Communauté des Botanistes d'Europe. Mais, lorsque ceux-ci essayèrent d'éradiquer pour de bon la rose de nuit, l'existence de cette dernière avait déjà été divulguée à plusieurs autres sorciers qui décidèrent de s'en emparer. Si bien qu'aujourd'hui, on ne sait pas exactement qui en possède une ou non et qu'on ne peut réellement prévenir de ses dangers.
 
 
Lorsque ma mère clôtura son bref récit, les cris des mouettes dans le ciel me parurent plus étouffés qu'à l'ordinaire.
 
 
— Je comprends que tu aies été fascinée par cette histoire, lâchai-je dans un souffle. C'est diablement intéressant...
— C'est une légende, rien de plus, dit-elle ma mère. On ne sait pas réellement qui a créé cette fleur ni même s'il ne s'agit pas d'une simple évolution naturelle d'une rose qui n'avait nulle intention de nuire.
— Certains légendes sont vraies, maintins-je néanmoins. Plus que ce l'on ne veut bien croire.
— C'est vrai, admit-elle avec un petit sourire.
 
 
Attendrie, je me levai et vins m'asseoir sur ses genoux, bien que je sois presque aussi grande qu'elle du haut de mes quinze ans.
 
 
— Tu me pardonnes pour mon comportement de ces derniers jours ? murmurai-je, le nez enfoui dans son épaule.
— Bien sûr que je te pardonne, ma chérie. Tu sais bien que je ne t'en voudrais jamais pour ça.
— Merci.
— D'ailleurs, si tu ne veux pas venir demain, tu n'es pas obligée. Ça risque d'être difficile pour toi.
 
 
Je me défis de notre étreinte et la dévisageai, les sourcils froncés.
 
 
— Qu'est-ce qu'il y a, demain ?
— Mais enfin, Alicia ! C'est le baptême d'Ezéchiel !
 
 
 
 
~*~
 
 
 
 
C'était un bébé adorable, Ezéchiel Martins. Du haut de ses quelques mois, il était déjà très éveillé et babillait joyeusement depuis son berceau, posant à qui mieux-mieux le vert de ses yeux sur les personnes assemblées dans le jardin de la demeure des Martins pour faire sa rencontre. Toute fière de son cousin, Joyce ne pouvait s'empêcher de le contempler avec un sourire niais qui, en d'autres circonstances, lui aurait attiré moultes moqueries de ma part.
 
 
— Tu avais disparue, toi ! m'accueillit-elle, radieuse.
— Un peu, répondis-je distraitement.
 
 
J'ai bien fait de venir, pensai-je intérieurement en lui accordant une brève accolade. Avec son regard bien aiguisé, Joyce aurait eu tôt fait de remarquer mon absence et j'en aurais sans doute entendu parler pendant des années. Et puis, bien que ma mère m'ait autorisée à rester à la maison pour la journée, je me serais sentie trop coupable d'ignorer ainsi l'entrée officielle dans le monde d'un être aussi petit. En effet, Ezéchiel n'y était pour rien dans ce que je traversais, et je m'en voulais déjà de l'avoir évincé de ma mémoire alors qu'il n'avait pas six mois. Les isolements physique et psychique dans lesquels m'avaient projetée Poudlard puis la rose de nuit m'avaient fait totalement oublié la grossesse d'Haley Martins et, noyée dans les événements qui s'étaient enchaînés depuis la mort d'Adelyn, Joyce avait sans doute oublié de me prévenir de la naissance de son cousin. La perspective d'une journée au cours de laquelle je ne pourrais plus éviter Joyce, James et Sirius comme je le faisais depuis le début de l'été ne me séduisait pas du tout, mais je me devais de faire cet effort.
 
Enthousiaste au possible, Joyce me traîna jusqu'à la table qui avait été attribuée aux « jeunes », entraînant Jake, Marly et Arthur dans notre sillage. Dorcas Meadowes, Elladora Simpson et les deux Maraudeurs s'y trouvaient déjà et, si les deux derniers se levèrent pour venir nous saluer, les deux autres restèrent immobiles, comme figées dans une gêne dont je ne compris pas la cause. Effectivement, aux innombrables tentatives de Dorcas pour engager la conversation, Elladora ne répondait que par mono syllabes et, en nous voyant arriver, elle coupa même la pauvre Serpentard en plein milieu d'une phrase et s'éclipsa aux toilettes, prenant bien soin de bousculer Jake de l'épaule au passage.
 
 
— Eh bien, quelle ambiance ! railla Sirius, moqueur. Qu'est-ce que tu lui as fait ? demanda-t-il à mon frère.
— C'est une longue histoire, répondit Joyce à la place de Jake. Qui ne te regarde absolument pas, d'ailleurs.
 
 
Vexé, Sirius parut être sur le point de répliquer mais James lui tapa affectueusement sur l'épaule avec une mimique qui cherchait clairement à le dissuader de se disputer avec Joyce maintenant.
 
 
— On se met à table ? proposa-t-il avec un tact que je ne lui connaissais pas. Cette salade a l'air délicieuse...
 
 
Miracle ou non, il réussit à calmer le jeu et tout le monde prit place autour de la table. Dès qu'Elladora revint, la mine peu affable, nous commençâmes à nous servir et le déjeuner débuta dans une ambiance étrange qui ne semblait amuser que Joyce. Dorcas, Jake et Elladora paraissaient soit gênés soit irritée, tandis qu'Arthur, Marly, James, Sirius et moi ne comprenions rien.
 
Après la cérémonie au cours de laquelle Joyce devint la marraine d'Ezéchiel et prêta serment, tel que le voulait la tradition sorcière, de le protéger au prix de sa vie, nous nous isolâmes toutes les deux dans un coin du jardin, Joyce tenant précautionneusement son nouveau filleul sur ses genoux. Je savourai un instant la quiétude du moment, loin des conversations empreintes de gravité des adultes puis, ma curiosité n'y tenant plus, demandai à mon amie :
 
 
— Je peux savoir ce que c'était ce numéro au déjeuner ?
 
 
Joyce ne se priva pas pour rire à gorge déployée avant de daigner me répondre :
 
 
— Ton frère et Dorcas sortent ensemble.
— Quoi ?! m'étranglai-je. Mais je croyais qu'il était amoureux d'Elladora !
— C'est ce que tout le monde pensait. Même Elladora devait en être convaincue pour réagir aussi mal...
— Je ne comprends vraiment pas mon frère...
— On est deux ! renchérit Joyce. Mais bon, il peut bien faire ce qu'il veut.
— Tu penses vraiment ce que tu viens de dire ? m'esclaffai-je. Te connaissant, t'as déjà dû aller le voir pour lui dire qu'il faisait n'importe quoi.
— Bien sûr que je l'ai fait. Dorcas est une fille géniale et j'ai pas envie qu'il fasse n'importe quoi avec elle juste parce qu'il est paumé face à ses sentiments.
— Il n'a pas voulu t'écouter ?
— Tu connais Jake... soupira Joyce en replaçant le chapeau du bébé sur son front.
— Bah non, justement.
 
 
La Serpentard m'envoya un regard désolé et se tut un instant, cherchant quoi dire.
 
 
— Il m'a dit de me mêler de mes oignons et qu'il accepterait des conseils venant de moi le jour où je les appliquerais dans ma propre vie.
— Aïe... grimaçai-je. Il faisait référence à quelque chose en particulier ? m'enquis-je, réalisant que cela faisait longtemps que Joyce et moi n'avions pas parlé de choses futiles – comme les garçons, par exemple.
 
 
Saisissant l'allusion, Joyce rougit et haussa les épaules, restant dans le flou. Pendant ce temps, Ezéchiel commença à s'agiter, comme s'il voulait se défaire de l'étreinte que sa cousine maintenait autour de lui.
 
 
— Oh oh... s'amusa Joyce. T'en as marre d'être avec moi, petit bonhomme ? Tu préfère aller avec Alicia ?
 
 
Avant même que je ne comprenne ce qu'il m'arrivait, Joyce m'avait refilé le bébé et celui gazouillait joyeusement entre mes bras. M'offrant une risette, il entoura mon index de son poing et commença à le serrer avant de fermer les yeux. En le voyant faire, je sentis mon rythme cardiaque s'accélérer et mes yeux me piquer, n'ayant plus qu'une envie : me débarrasser de lui et de sa désagréable innocence.
 
 
— Je ... Je sais pas comment faire avec les bébés, fis-je à Joyce en lui tendant Ezéchiel qui, perdu, avait rouvert les yeux.
— Mais si, tu t'y prends très bien ! insista-t-elle, ne comprenant le message subliminal que je tentais de lui faire passer.
— Je t'ai dit que je savais pas ! m'énervai en me levant.
 
 
Plus mal à l'aise que jamais je ne l'avais été, je reposai maladroitement le bébé sur les genoux de Joyce et m'enfuis en courant.
 
 
— Alicia ! entendis-je Joyce crier, mais je ne pris pas la peine de me retourner et franchis le portail de la propriété avant qu'elle n'ait eu le temps de faire un geste.
 
 
 
 
~*~
 
 
 
 
Evidemment, après une telle réaction, Joyce n'en resta pas là. Pendant toute la semaine qui suivit le baptême de son cousin et désormais filleul, elle vint frapper chez nous et ce n'est que grâce à la complicité de Marly que je parvins à la garder dehors.
 
 
— Tu sais que tu ne pourras pas l'éviter toute ta vie, me fit remarquer ma s½ur après lui avoir fait comprendre pour une énième fois que je ne souhaitais ni la voir ni lui parler.
— Je sais.
 
 
Marly poussa un soupir et s'assit sur mon lit, me retirant le livre que je faisais semblant de lire pour être sûre que je la regarde.
 
 
— Tu n'as peut-être pas envie qu'elle s'ajoute à la liste des personnes qui sont peinées par ta situation, mais en faisant ça, ce que tu risques, c'est plus que sa pitié. Tu risques de la perdre.
— Tu ne comprends pas ! m'agaçai-je. Je me fiche de sa pitié ! Qu'elle pleure des fleuves pour moi si ça lui chante !
— Bien sûr que je ne comprends pas, rétorqua Marly, visiblement blessée par mon emportement. Et à moins de vivre la même chose que toi, je ne comprendrais sans doute jamais. Tout ce que je te dis, c'est que c'est bien plus qu'une révélation qui est en jeu : c'est votre amitié.
 
 
Arrêtant là sa piètre tentative de me raisonner, Marly me planta un baiser sur la joue, me rendit mon livre et quitta ma chambre. Les yeux fixés sur la porte qu'elle avait refermée derrière elle, je fus forcée de reconnaître qu'elle n'avait pas tort. À trop se sentir repoussée, Joyce finirait par se vexer, et je considérais que nous nous étions déjà suffisamment disputées pour ne pas recommencer à nouveau.
 
Le lendemain, j'allai donc toquer chez les Martins et proposai à Joyce une balade afin que nous puissions parler un peu toutes les deux. Ayant au préalable soigneusement choisi notre itinéraire, je la conduisis vers le sentier qui gravissait la falaise en haut de laquelle se trouvait l'arbre aux messages et, comprenant où nous nous rendions, Joyce se tendit. Cependant, elle ne fit pas le moindre commentaire et nous atteignîmes le vieux chêne sans  avoir échangé le moindre mot.
 
Reliques et morceaux de papier délavés par la pluie pendaient toujours aux branches de l'arbre multi centenaire et j'en effleurai quelques uns du doigt tout en contournant le tronc afin de me retrouver face à la tombe de Tina et son bouclier floral d'edelweiss.
 
 
— Adelyn n'a jamais été assassinée, lâchai-je en détaillant du regard les zébrures qui ornaient le granit de la pierre tombale.
 
 
Joyce ricana sèchement.
 
 
— Ouais, c'est ce que les journaux ont annoncé. Ta s½ur devait être contente de...
 
 
Un éclat de colère me traversa et je la fusillai du regard, lui coupant le sifflet.
 
 
— Marly n'a jamais menti, si c'est ce que tu insinues, crachai-je. Adelyn s'est vraiment suicidée.
— Bordel, mais on ne va pas ravoir cette conversation pour la dixième fois ! Tu sais très bien que la Communauté a trempé dans cette affaire ! Elle a peut-être envoûté Adelyn pour qu'elle se suicide, mais elle n'en est pas moins coupable !
— Je suis d'accord. Mais... Et si Adelyn n'était pas et n'avais jamais été sa victime ?
— Hein ?
— Qu'est-ce que tu dirais si, en fait, cela fait des mois qu'on enquête sur la mauvaise personne, sur le mauvais crime ?
— Je comprends rien à ce que tu racontes, Alicia. Quelqu'un t'a retourné le cerveau ou quoi ?
 
 
Je me fis violence pour ne pas secouer Joyce comme un prunier jusqu'à ce qu'elle ne soit plus capable de m'interrompre. Lui annoncer ce que je cherchais à lui dire était déjà suffisamment difficile pour qu'elle se passe de commentaires.
 
 
— Tu te souviens de la rose que j'ai vue à Pré-au-Lard avant qu'on aille à la Cabane Hurlante avec Nathan ?
— Celle que tu trouvais super belle ?
— Ouais. Celle-là. C'était une rose de nuit.
 
 
Pensant que Joyce ne saurait pas ce qu'était une rose de nuit – après tout, ni Marly ni aucun de mes amis n'avaient su – je m'apprêtai à reprendre pour lui fournir plus d'explications mais le voile qui passa sur son visage fit mourir les mots dans ma gorge.
 
 
— Oh putain, Alicia ! Tu es... ?
 
 
 
 
Chapitre 14 : Essence d'innocence 
Antonia Clarke as Joyce Martins
 
 
 
 
Un chapitre assez calme mais, promis, dès le prochain, action, complot et intrigues reviennent ! Cependant, ce chapitre était pour moi essentiel, histoire de développer les conséquences immédiates de la stérilité d'Alicia, de préciser un peu plus d'où vient la rose de nuit (j'avoue, je suis fière de mon histoire) et de montrer comment Alicia évolue en sachant qu'elle ne peut plus avoir d'enfants. J'ai également essayé d'insérer quelques pistes pour les intrigues à venir (non, Ezéchiel et Jake ne sont pas visés) et j'espère que la fiction continue à vous plaire bien que le rythme ralentisse beaucoup en raison de mon emploi du temps chargé.
 
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#Posté le mardi 03 avril 2018 11:15

Modifié le samedi 07 avril 2018 09:52

  • Commentaires

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HeilenBlack, Posté le mercredi 18 avril 2018 04:20

Hello !

Et bien, on dirait que je suis enfin à jour chez toi ! (: J'en suis absolument ravie, parce que je me suis rendu compte que lire me faisait beaucoup de bien et que ton histoire m'avait terriblement manqué ! Alicia y est pour beaucoup, même si j'ai été toute aussi contente de retrouver les autres !

Alors que dire ? A part que tout semble s'enchaîner à grande vitesse ! Est-ce que c'est moi qui rêves ou le rythme a changé ? J'ai l'impression qu'une énorme catastrophe va finir par vite arrivée et je ne le sens, mais alors vraiment pas du tout ! Je crains le pire !

Je t'avoue que j'ai été très surprise d'apprendre la stérilité d'Alicia. C'est vrai, c'est un sujet que l'on aborde rarement chez des jeunes de son âge (même aux nôtres) et même si au début, je trouvais sa réaction excessive, j'ai fini par comprendre son point de vue et à mieux saisir son mal-être. La scène où Joyce lui donne de force le petit Martins m'a vraiment touché, parce que j'ai fini par réalisé qu'elle ne pourrait jamais avoir d'enfants et un instant, je me suis mis à sa place et j'ai mieux compris. Ca doit être plus que terrible, la pauvre... :|

Par contre, je suis heureuse de voir que sa relation avec sa jumelle a évolué positivement ! Dommage qu'il ait fallu un drame pour que ça en arrive-là, mais c'est une bonne surprise et la façon dont tu l'as introduite dans l'histoire m'a paru très crédible. Bravo à toi ! J'espère juste qu'elles trouveront la force de continuer à l'entretenir, plutôt que de la détériorer comme elles le font depuis le début.

Mais je me demande : est-ce que ça va rester tel quel avec ses frères ou il y aura du changement comme avec Marly ?

Autre chose : la découverte de son appartenance au Cercle des Sept Dons ! Alors celle-là, je l'ai vraiment pas vue venir ! Tu m'as scotché sur place en nous balançant cette bombe ! Tu m'aurais parlé des Potter ou bien de quelqu'un d'autre, d'accord, mais les Azer ! Surprenant ! Bon, du point de vue de certains lecteurs, ça aurait pu être plus logique, mais moi, perso, je trouve que tu as tellement bien mené la chose que je n'ai rien vue venir et ça encore plus agréablement surprise ! Une autre affaire à suivre donc ! ;) (c'est la combien déjà ? xD)

MON DIEU ! JE VIENS D'AVOIR LA PEUR DE MA VIE :| En voulant aller à la ligne, toute ma page s'est bloquée et j'ai bien cru perdre tout mon commentaire :o cette frayeur ! xD

Du coup, j'ai oublié ce que je voulais dire d'autres ^^' mais en tout cas, sache que c'est toujours aussi bien, et maintenant que j'ai replongé dedans, j'ai d'autant plus hâte d'avoir la suite ! :D

Bonne continuation et à bientôt alors (:
Déborah


ehlilouswritings, Posté le vendredi 13 avril 2018 06:32

Bonjour Mahaut,
J’ai encore beaucoup de lecture en retard, mais je ne peux résister à la tentation de lire d’abord ton chapitre car j’attends toujours avec hâte que tu publies. Me voici donc après avoir lu ce chapitre 14 !

Il ne s’y passe certes pas de scènes transcendantes qui ouvrent la voie à de nouvelles intrigues et nouvelles révélations mais il me paraît malgré tout primordial compte tenu de la nouvelle qui s’abat sur Alicia. Il fallait que tu lui laisses du temps pour elle, pour accépter cette situation, pour s’ouvrir ou non à ses proches. J’aime comme tu as abordé les choses. Vis-à-vis de sa mère notamment et de cette conversation qui nous permet de comprendre pourquoi cette dernière se sent aussi responsable. Je me demande si dans le fond, elle n’était pas un peu visée, mais c’est peut-être moi qui me fait des films. En tout cas, j’ai aimé comment tu décrivais ce mal-être chez Alicia et cette relation nouvelle et naissante qu’elle entretient de nouveau avec Marly qui lui apporte des conseils précieux.

Ainsi, elle s’ouvre enfin à Joyce et je dois dire qu’il était temps. Je me demandai quelle serait sa réaction, aussi j’ai hâte de voir le prochain chapitre. Même si je pense que tu ne mettras pas en scène la suite de cette scène en question mais que tu partiras sur un condensé de ce qui a été dit et de l’évolution de la relation Alicia-Joyce.

Dans le même temps, tu nous montres que les choses bougent question sentiment et tu tais l’essentiel de ce propos concernant Joyce. Aussi, je m’interroge. Maintenant concernant Jake et Elladora et les autres, et bien nous verrons. J’avoue n’avoir pas nécessairement saisi tes intentions, aussi je préfère me taire et attendre patiemment que tu publies la suite ?


Danslaboiteamusique, Posté le samedi 07 avril 2018 10:27

Bon, pour faire bref:

J'ai adoré la première partie avec mon petit Gusgus *-* Déjà parce que, comme dit en live, j'adore ce genre de conversation complètement prenante, mais mine de rien vide de réelles réflexions.

L'approfondissement de l'état d'Alicia est aussi vraiment bien fait ! Savoir à qui elle en parle, à qui elle n'en parle pas.. et pourquoi. Avoir la réaction de Théo des années après. Et puis la tension avec Alwena. Et cette inquiétude toxique qui est généralement le pire quand ça va pas, parce que dans ce genre de situation, on a juste envie de tout oublier et pas que tout le monde nous saoule avec leur empathie.

J'ai adoré la légende de la rose de nuit, mais je vois pas trop en quoi ça venge de l'indifférence. de Ronsard...

Bébé Ezéchiel est juste trop chou et Joyce me fait trop rire à devenir gaga xD
Le passage ou Alicia tient le bébé dans les bras m'a brisé le coeur :'(
Et par contre je veux en savoir plus sur ce triangle amoureux !!!

Mais pourquoi !! Pourquoi ! Hein pourquoi tu finis comme ça ? Non. Je suis désolée. Ca se fait pas. Je veux voir la réaction de Joyce !!!

Woilà :)


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    “ À défaut d'écrire, je réécris. ” - mercredi 11 avril 2018 16:12
    1 kiff

    Création : 05/01/2015 à 13:33 Mise à jour : Hier à 13:43

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